Trouble de la libido : ce qu’on a besoin de savoir (et qu’on ne nous dit pas!)

Sexothérapeute depuis maintenant une dizaine d’années, je peux énoncer avec certitude que le motif de consultation le plus fréquent est sans conteste la baisse de libido. 

Les femmes que je reçois évoquent une diminution voire une disparition de leur désir sexuel, depuis plus ou moins longtemps selon les histoires et antécédents de chacune. 

Cette problématique inquiète beaucoup les patientes, qui arrivent  en séance avec un véritable sentiment d’urgence, alors exacerbé lorsque les répercussions du trouble sur la vie de couple sont importantes (conflits, incompréhension du partenaire, rupture imminente …).

Dans un premier temps et afin de s’assurer de l’absence d’organicité du problème, je propose d’effectuer analyse de sang et bilan hormonal (prescrits par le médecin traitant). Je m’assure donc à ce moment-là que la formule sanguine est bonne, que les différents marqueurs pouvant expliquer un trouble du désir (TSH pour la thyroïde, ferritine pour l’anémie, glycémie …) sont dans la moyenne, afin d’écarter toute cause physiologique. 

Cette phase-là généralement rassure les patientes car ce sont des données scientifiques, médicales, communément admises, et qu’on peut agir dessus directement à l’aide de traitements (en plus d’une modification de l’hygiène de vie générale). 

Or dans de très nombreux cas, la formule sanguine est bonne et le bilan revient normal, ce qui en soi est une excellente nouvelle (ce que j’essaie de faire passer comme message, voyant bien la déception de ces femmes), mais  ce qui interroge grandement les patientes qui comprennent encore moins ce qui leur arrive. 

Et bien souvent, la perspective de chercher les causes plus psy, plus sexologiques de leurs troubles, les décourage un peu, du moins au départ. 

Or il y a quelque chose que j’ai appris au fil des ans, dans ma pratique professionnelle, dans ma vie personnelle, et en observant un peu ce qui se passe autour de moi : un élément clé de notre quotidien à tous influence grandement la qualité de notre libido. Or, ce n’est pas enseigné dans les formations en sexologie ou en psychologie, cela ne figure pas non plus dans les livres spécialisés, et c’est encore moins relayé par les médias dits santé ! 

Cet élément fondamental, qui explique quand même selon moi beaucoup de choses, est ce qu’on pourrait appeler notre pulsion de vie, ou plus simplement notre énergie vitale globale. 

L’énergie vitale globale 

Ce que j’appelle énergie vitale globale est la quantité d’énergie générale dont on dispose chaque jour, et qui nous permet de fonctionner et d’effectuer toutes les actions requises dans notre quotidien (se lever, se laver, aller au travail, s’occuper de ses enfants, s’occuper de sa maison, faire ses courses, répondre à ses différentes obligations, faire des projets, etc.). 

C’est une énergie qui selon moi est certes physique (et qu’on peut facilement mesurer avec le fameux bilan sanguin dont j’ai parlé plus haut), mais elle est également (et surtout, devrais-je dire) émotionnelle, psychologique (à rapprocher éventuellement du concept de charge mentale), et instinctive. C’est cette énergie qui nous permet d’avancer dans notre vie dans tous les sens du terme, et d’accomplir des choses, à tous les niveaux (symbolique, matériel, psychologique, etc.). 

Il ne s’agit donc pas uniquement de notre tonus, mais bien de notre vitalité, de notre pulsion de vie, de ce qui nous pousse à aller vers la Vie (je ne parle pas là de parentalité mais dans un sens plus large). En psychanalyse, c’est Eros, en opposition à Thanatos.

Cette réserve disponible est tributaire de ce qui se passe matériellement dans nos vies, de l’impact de l’extérieur (les gens, le quotidien, notre cadre de vie) sur nous-même, de notre taux de stress, de ce qu’on traverse psychologiquement, des événements de vie qui nous arrivent, etc.

On la dépense donc en plus ou moins grande quantité selon notre qualité de vie et la façon dont on fait face à tout ce qui nous arrive. De même, elle se recharge plus ou moins facilement ou difficilement en fonction de ce qu’on a été capable de mettre en place pour cela, en accord avec nos besoins, à tous les niveaux de notre existence. 

Quel est le lien entre énergie vitale et libido ?

De la quantité et de la qualité de cette énergie globale dépendent notre capacité à agir, à mener à bien nos projets, notre forme physique, notre moral, mais également notre libido (l’énergie sexuelle est une forme d’énergie, donc fait partie intégrante de cette énergie vitale globale).

Plus on vit de stress, de moments difficiles, sans possibilité de récupérer et se reposer vraiment, plus cette réserve se vide et s’amenuise. 

A un moment donné, la nature étant décidément bien faite (et surtout au service de cette pulsion de vie), lorsque notre énergie vitale est trop basse, elle priorise : on fait alors ce qui ne peut pas être remis à plus tard, ce qui doit absolument être fait, et la libido, dans ces cas-là, n’est absolument pas sa priorité première. 

Instinctivement on fait donc ce qu’il faut pour rester en vie (on est dans la survie), et faire l’amour, aussi plaisant que ce soit, n’en fait dans cette phase-là de l’existence, pas partie. 

C’est ainsi que les femmes arrivent en consultation avec des bilans sanguins relativement normaux mais un désir sexuel à zéro. Or, comment peuvent-elle espérer une libido au beau fixe alors que leur énergie vitale est au plus bas ? Elles sont simplement en sur-régime, dans la compensation, elles piochent dans leurs réserves, sans forcément s’en rendre compte. 

Il est donc fondamental qu’elles comprennent rapidement le lien entre leur cadre de vie, leur énergie globale, et leur libido (ce que les approches classiques et les médias mainstream ont tendance à laisser de côté …).

Le trouble de la libido s’inscrit donc systématiquement dans un schéma de vie globale. Il ne doit pas être consigné dans la sphère intime, sans aucune interaction avec les autres sphères de la vie. Et pour le traiter, il faut s’attacher à la personne dans sa globalité. 

En conclusion

Le trouble de la libido, lorsqu’il n’est pas physiologique, est toujours le symptôme d’un malaise plus général. Et dans mon expérience professionnelle, j’ai souvent constaté que c’était lié à un cadre de vie qui ne convenait plus. Les besoins n’étant pas comblés, la récupération énergétique ne peut se faire. On se vide, on s’épuise, et la libido, en plus du reste, en pâtit.

Dans mon prochain article, je décrirai plus en détail ma manière d’accompagner les troubles de la libido, lorsque la physiologie est normale.